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Ce blog est né du désir de mieux faire connaître la profession d'orthophoniste. Merci de votre passage !

lundi 30 janvier 2012

Il n'est pas surpris


Bref.
On ne peut pas dire qu’il soit surpris. Il aurait bien aimé l’être. Agréablement. Mais il sait bien. Depuis longtemps. Même s’il avait une immense envie de ne pas regarder ça en face. De faire comme si de rien. Il savait quand même. Léo sourit si peu. Pour ne pas dire pas du tout. Il les regarde à peine. Il ne joue pas dans le jardin. Ne babille pas comme son petit cousin. Même âge, pourtant. Comparaison permanente. Douloureuse.


Bref.
C’est officiel, son fils est autiste.


Le pédopsychiatre est sympa. Chaleureux. Pas de bol. Il aurait préféré un type odieux. Un grand ponte confit de suffisance. Il les aurait pris de haut. Ils auraient quitté son bureau furieux. Claquer la porte. Ils ne l’auraient pas cru. Fastoche.


Là, pas possible. Grand gars bourré d’empathie. Il a pris le temps. Il a expliqué le pourquoi du diagnostic. Synthèse des différents bilans effectués dans le service. Echos de tous les professionnels qui ont vu Léo. Cohérence. Ils l’ont cru, sa femme et lui. Ne se sont même pas révoltés. Ça viendra plus tard. Peut-être. Sans doute. Il ira hurler dans le jardin, au besoin.


C’est sournois, la gentillesse. Ça fait gober des horreurs sans même que vous songiez à vous rebeller.   


Il ne réalise pas encore. Suspendu entre deux éthers. Mal de l’air. Pas confortable. Dans ses rêves de père, qu’est-ce qui restera accessible ? Qu’est-ce qui va se casser la figure ? Qu’est-ce qu’il parviendra à inventer d’autre ? Quelle place restera-t-il pour la fantaisie ? Une grande, il espère. Autisme ou pas, les rêves ne sont pas faits pour être sages. Pour ça, il y a la réalité. Il sent qu’elle va bien s’occuper de leur cas, la réalité.


Ils retourneront voir le pédopsy la semaine prochaine. Discuter prises en charge et protocoles. Des mots étranges. Il sent qu’il n’a pas fini d’étendre son vocabulaire.


Vocabulaire. Voilà un terme à-propos. Il en aura, Léo ? Il parlera, un jour ? Ils se confieront des secrets de mecs ? Ils auront cette complicité de mots ? Il ne sait pas pourquoi. Au milieu de tout cet inconnu, c’est ça qui émerge à cet instant. Pourvu que Léo parle.


Finalement, c’est peut-être bien que le pédopsy soit sympa. Il sent qu’il n’a pas fini de le voir. Lui, et les autres professionnels du service. Il lui parlera de cette trouille. De cette envie si forte au milieu des autres. Le langage de Léo. Il se doute qu’il n’y aura pas de réponse. Qu’il est impossible de rien savoir d’avance. Mais il aura besoin d’en parler. Et de savoir comment Léo sera accompagné de ce côté.




Bref.
Il a besoin d’un orthophoniste.  



Décret numéro 2002 721 du 2 mai 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'orthophoniste:
Art3: L'orthophoniste est habilité à accomplir les actes suivants: la rééducation des fonctions du langage chez le jeune enfant présentant un handicap

lundi 16 janvier 2012

Pas du matin

Bref.
Son réveil sonne. Elle pense grmmmblll frrrtttt mmm quoi ? Elle se retourne. Le réveil continue de fanfaronner. Elle s’assoit. Coupe la sonnerie. Allume la lumière. Ça lui agresse les yeux. Elle repense grmmmblll frrrtttt mmm. Le matin devrait être interdit par la loi.

Un café plus tard elle émerge. Ça va mieux. Elle regarde ses mails. Ecoute la radio. Elle fait griller un toast. Refait du café. Tartine le toast. L’entrain s’éveille avec la saveur miel-beurre salé sur sa langue. Rien de meilleur. Parfait pour qu’elle démarre enfin. Premier sourire de la journée. Elle vient de penser à Gwen. Ce sera son premier patient aujourd’hui. Un petit garçon handicapé. Il progresse lentement mais constamment. Elle s’émerveille souvent. Elle passe en revue mentalement tous les autres. Ça y est, elle a la pêche. Ça mérite un autre toast.

Elle pose sa tasse dans l’évier. Pas de vaisselle. Plus tard. Attrape son manteau. Ses sacs. Ses clés. En avant.

Il fait froid. Normal c’est l’hiver. Elle se demande si l’hiver ne devrait pas aussi être interdit par la loi. A réfléchir. Elle arrive au cabinet. Jette un œil dans la salle d’attente. Tout est bien rangé. Accueillant. Parfait. Elle monte un peu le chauffage. S’installe dans son bureau. Sort les dossiers du jour. 4 enfants, 2 ados, un adulte, 3 personnes âgées. Langage oral. Langage écrit. Logique. Voix. Mémoire. Certes. Mais d’abord et avant tout, des gens. Des humains, comme elle. Complexes. Uniques. Passionnants. Enervants parfois. Arrivés chez elle parce qu’ils étaient en délicatesse avec leur communication. Leur langage. C’est si essentiel, le langage et la communication, dans une vie… En souffrance, souvent. Sur la défensive, de temps à autre. Elle les prend comme ils sont. Elle essaye du mieux qu’elle peut. Entendre leur demande. Ce qu’ils en disent. Et ce qui, peut-être, se cache derrière sans savoir se formuler. Considérer avec respect ce qui est mis en avant. En tenir compte. Ne pas toujours s’y arrêter.

Sans cesse, chercher le plus de justesse possible dans les séances qu’elle propose. Nous sommes tous si différents.

Entendre les craintes de l’écolier, les questionnements des parents, les détresses des personnes âgées. Garder sa place de thérapeute. Remettre en perspective.

Elle imagine quelques contenus possibles pour les séances du jour. La plupart du temps, ça ne lui sert pas. Elle prend ses patients comme ils sont. Là où ils en sont. Ce jour-là à cette heure-là. Elle considère que c’est à elle de s’adapter à eux. Pas l’inverse. Et encore heureux. Elle jongle en live avec ses savoirs, son expérience clinique. Tenter de trouver le meilleur contenu, le support idéal, la façon de travailler adaptée. Presqu’à l’improviste, à chaque fois. En fonction de ce que racontera Simon ou Eléonore en arrivant. Et en gardant en tête le fil conducteur du travail commencé avec eux. Douceur et dynamisme. Analyser, tisser des liens, donner du sens. Son quotidien.

Elle adore ça. Parfois elle est fatiguée. Elle en a marre. Jamais longtemps. Elle voit bien ses copains. Ceux, nombreux, que leur boulot machinal et sans saveur saoule allègrement. Elle mesure sa chance. La richesse de son travail à elle est exigeante. Mais oh combien précieuse.

Ce soir, elle se repassera les petites victoires et les grandes joies de la journée. Les questions, les tristesses, et les souffrances aussi. Bilan lucide. Pour aborder le lendemain sans faux-semblants. Et garder son optimisme chevillé au corps.


Bref.
Elle est orthophoniste.

On va voir ce que l'on va voir


Bref.
On va voir ce que l’on va voir. Si d’aucuns attendent d’elle qu’elle déprime ou qu’elle baisse les bras, ils vont attendre longtemps. Elle n’a pas particulièrement l’âme d’une warrior, pour parler comme Louis. Mais tout s’apprend. Surtout quand on a de bonnes raisons pour ça.

Elle a vomi. Quand Maxence a appelé. Le grand ami de Louis. Maxence qu’elle connaît depuis le primaire. Il a dit :
-          Rose, Louis a été renversé devant la fac. Il était inconscient. Les pompiers l’ont emmené à l’hôpital. J’ai dit que c’était moi qui vous prévenais.
Sa voix tremblait. Il n’a rien dit d’autre. Rose a compris. Ça a l’air grave. Elle a remercié. Du moins elle croit. A raccroché. A vomi.

Elle a appelé Paul. Il est rentré tout de suite. Ils sont allés à l’hôpital ensemble. On n’est pas trop de deux parents, dans ce genre de cas.

Le médecin a dit :
-          Traumatisme crânien.
Et il a cru bon de rajouter :
-          Sévère.

Rose se demande s’il existe réellement des traumatismes crâniens qui ne sont pas sévères. Elle suppose que oui. S’il l’a précisé c’est pour quelque chose. Elle elle est comptable. Elle n’y connait rien en médecine.

Cela fait un mois maintenant. Elle va à l’hôpital tous les jours. Elle parle à Louis, ou pas. Elle lui tient la main, ou pas. Elle improvise. Juste elle est là. Paul y va autant qu’elle, Lucie aussi. Ce n’est facile ni d’être parent, ni d’être sœur, présentement. Mais chacun tient sa place avec cœur.

Louis est sorti du coma au bout de trois semaines. Elle a pleuré. De joie. Ou de tristesse. Ou des deux. C’est si confus. Son garçon revenait à la vie. Mais dans un drôle d’état. Il ne marche pas. Il ne mange pas. Il parle, mais ce qu’il dit est incompréhensible. Elle ne sait pas s’il la comprend. Pas sûr. Il y a certainement d’autres choses qu’elle ne voit pas.

Les médecins ont dit :
-          Il faudra du temps. Il faudra se battre. Il faudra de l’énergie. Il faudra l’entourer.

Elle a fait oui de la tête. Déterminée. Si Louis a besoin qu’elle devienne battante, elle le deviendra.

Elle a déjà rencontré la kiné. Une jeune femme très gentille. Elle a expliqué plein de choses. Elle a plaisanté en douceur. C’était bon de rire.

Il reste le vaste chantier de l’alimentation et du langage.

Bref.
Elle a besoin d’un orthophoniste.


Décret numéro 2002 721 du 2 mai 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'orthophoniste:
Art3: L'orthophoniste est habilité à accomplir les actes suivants: la rééducation des fonctions du langage oral ou écrit liées à des lésions cérébrales localisées (aphasie, alexie, agnosie, agraphie, acalculie).
la rééducation des troubles de la déglutition

lundi 9 janvier 2012

Un coup au moral



Bref.
Ça s’appelle un coup au moral. Pas grave. Mais flagrant.


L’ORL a dit :
-          Elle a des oreilles dans un état épouvantable !
entre deux scènes mémorables d’Emeline. Il la connaît, ça fait presqu’un an qu’il surveille ses tympans de près. Il sait qu’au naturel, elle est mimi et coopérante. Joyeuse. Espiègle. Très sérieuse parfois. Pas colérique et opposante comme aujourd’hui. Alors il a expliqué :
-          Son humeur s’en ressent sans doute beaucoup.
Et puis il a précisé :
-          Elle entend certainement mal, et ça doit l’agacer. Comme elle ne sait pas vous l’expliquer aussi précisément, elle se met en rogne.
CQFD. Pour se mettre en rogne, elle se met en rogne. En ce moment, c’est un festival. Certaines soirées sont épiques.
Emeline s’est calmée quand l’ORL lui a expliqué.

Bref.
Un coup au moral.
Les otites séreuses ont commencé au début du printemps dernier. Ils ont tenu tant bien que mal jusqu’à l’été. Le soleil et les vacances ont fait le reste. Mais depuis l’automne, ça recommence. Emeline est suivie de près. Traitement homéopathique. Traitement allopathique. Ils ont testé les deux. Elle s’en fout des chapelles, elle veut que ça aide sa fille. Simplement. Elle y croyait. Elle pensait vraiment que ça allait mieux. Qu’ils allaient stabiliser les choses.
Et puis non.
Ce n’est pas méchant, des otites. Le coup au moral passera tout à l’heure au parc. En faisant la zouave avec Emeline. Elle le sait.
L’ORL a dit que si ça durait encore, il faudrait poser des yoyos. Et l’anesthésie générale, elle ne la sent pas. S’il faut, il faut. Mais avant, il a parlé d’essayer des exercices pour entraîner la trompe d’Eustache. Elle ne sait pas vraiment ce que c’est que la trompe d’Eustache. Mais ça a l’air important qu’elle fonctionne bien. Ce n’est pas le cas chez Emeline. L’ORL a dit qu’à 6 ans, l’âge d’Emeline, les exercices pouvaient commencer à bien marcher. Ça lui plait bien, cette idée. Ni médicament, ni chirurgie. Juste de la mécanique pour ventiler mieux l’oreille. Enfin si elle a bien compris.
Ça aide le coup de blues à passer. Ça se tente, cette histoire de rééducation.

Bref.
Elle a besoin d’un orthophoniste. 






Décret numéro 2002 721 du 2 mai 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'orthophoniste.
Art. 3. L'orthophoniste est habilité à accomplir les actes suivants : Dans le domaine des pathologies otorhinolaryngologiques : la rééducation des troubles vélotubotympaniques.

mercredi 4 janvier 2012

L'air d'une andouille


Bref.


Il doit avoir l’air d’une andouille. Ou d’une poule. Une qui a trouvé un couteau, hein. Pas n’importe laquelle.

Il ne peut pas rentrer chez lui.

Il fait un petit tour à pieds. Le quartier est plutôt joli. Ça va l’aérer. Quand il reviendra dans un quart d’heure, tout ira bien. Il prend la rue des armateurs. Remonte jusqu’au marchand de journaux. Salue Albert de loin. Il n’entre pas. Traverse. Va au distribanque. Veut retirer 20 euros pour se donner une contenance. Pour justifier du détour.

Merde.
Là non plus, il ne sait plus comment faire. Ça l’énerve. Ça l’angoisse, aussi. Peut-être que s’il arrivait à réfléchir calmement, il retrouverait la procédure. Mais il ne peut pas. C’est quoi ce bazar ? Pas foutu de retirer des sous à un distributeur ? Ni de manipuler le système de sécurité d’entrée de sa propriété ? Il est ingénieur, à la fin ! Pas le premier couillon venu, non plus !


Il retourne sur ses pas. Il va bien falloir qu’il arrive à rentrer. Au pire il criera un grand coup devant la grille. Sa femme est à la maison. Elle devrait l’entendre, la cour n’est pas si grande.


Il regarde ses pieds. Curieux. Il sait encore marcher, il sait encore à peu près parler, il n’est pas amnésique. Tout semble rouler, au premier abord. D’ailleurs le neurologue lui a dit à peu près ça, en le faisant sortir de l’hosto. Il a dit :

-          Vous vous en sortez bien !
Et puis :
-          C’était un petit accident vasculaire cérébral. On va vous surveiller de près, mais vous ne devriez pas avoir trop de séquelles.


Pas trop de séquelles. Enchanté. Et c’est quoi, alors, ce bazar ? Toutes ces choses qu’il ne sait plus par quel bout attraper ? Il lui faut une plombe pour s’habiller. Pour s’habiller, bon sang ! Un truc aussi facile et automatique que ça ! Parfois il commence à enfiler son pantalon avant d’avoir mis son caleçon. Faut quand même pas être bien. Hier midi il a cru qu’il n’arriverait pas à manger son œuf à la coque. Il a saisi sa fourchette. Dominique lui a dit :


-          Chéri, essaye avec ta cuillère, ça marchera mieux !


Il s’est senti le dernier des nuls. Mais Dominique a souri. Un gentil sourire complice. Alors ils ont ri tous les deux. C’était bon.


Il se dit qu’il devrait rigoler de tout ça plus souvent. Le truc, c’est que ça a du mal à le faire marrer. Trois semaines qu’il est sorti de l’hosto. Officiellement, tout va bien. Cette bonne blague.


Il pense qu’il aimerait reprendre son travail. Mais qu’il en est incapable. Il pense que Dominique aime partir seule une semaine par-ci par-là, chez un de leurs enfants ou avec une amie. Et que dans l’état où il est, il est incapable de rester seul. Pourtant en apparence tout va bien. Aux yeux de leurs amis, il semble parfaitement remis. Incompréhensible.


Il arrive chez lui. Dominique le guettait, elle vient ouvrir la grille. Elle a compris. Elle dépose un bisou tendre sur sa joue.


-          Tu as été long, je m’inquiétais.


C’est ça. C’est exactement ça. Il est long, pour tout. Et ça l’inquiète, lui aussi.


Bref.
Il a besoin d’un orthophoniste.







Décret numéro 2002 721 du 2 mai 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'orthophoniste:
Art3: L'orthophoniste est habilité à accomplir les actes suivants: la rééducation des fonctions du langage oral ou écrit liées à des lésions cérébrales localisées (aphasie, alexie, agnosie, agraphie, acalculie)

dimanche 1 janvier 2012

Un train ralentit

Bref.
C’est du chinois.

Un train ralentit un peu avant d’arriver dans une baignoire qui cueille des pommes. Cherche combien va lui rendre la vendeuse. La maîtresse de Ronan donne des pochettes de crayons aux enfants pour l’anniversaire des singes du zoo. A-t-elle assez de billes ? Elle ne connait pas de Ronan. Calcule combien d’œufs il faudra pour fabriquer 10 pantalons. Combien peut-on faire de colliers avec l’âge du capitaine, sachant qu’il faut un litre de jus d’orange par marche d’escalier ? Elle préfère le jus de pommes. Et les ascenseurs.

Elle a quatre problèmes à faire pour demain. Problème, c’est le mot. C’en est un sacré, pour elle.

Elle n’y comprend rien. Quand la maîtresse annonce « mathématiques », elle sent un truc bizarre dans son ventre. La semaine dernière elle a eu très mal à la tête. Le directeur a appelé papa. Ils ont regardé la télé ensemble l’après-midi. Et puis joué aux legos. C’était bien. C’est rare que papa ait le temps. Jouer toute seule c’est nul. Souvent elle s’ennuie. Papa il a des idées super chouettes.

Elle se lève. Elle n’aime pas ses devoirs, ce soir. Elle préfère quand il faut apprendre une poésie. Elle va chercher son doudou. Tant pis si ça fait bébé.

Les chiffres, c’est compliqué. Elle compte mal. Elle ne retient pas les mots. Vingt, trente, quarante. Plouf, zblim, tac. Ça serait pareil. Elle est perdue. Elle ne sait pas calculer. On lui a montré sur ses doigts. Elle essaye. Parfois ça marche. Parfois non. Elle ne sait pas pourquoi.

Elle travaille beaucoup avec maman. Maman arrive à rester calme. La plupart du temps. Elle voit bien quand même que ça l’agace. Quand elles ont préparé un devoir pendant plus d’une heure et qu’elle le rate quand même. Quand maman a expliqué un exercice et que le lendemain, elle n’y arrive plus. Quand elle sait très bien sa leçon mais qu’elle ne peut pas répondre aux questions de la maîtresse. Quand elle fait un plus au lieu d’un moins. Ou qu’elle fait des trucs à l’envers. L’autre jour maman a crié. « On ne peut pas faire 32 moins 54, enfin, Clarisse ! ». Elle ne sait pas pourquoi. Elle a baissé la tête. Elle avait envie de pleurer.

Elle est souvent perdue. Et quand elle est perdue, souvent, on la gronde. Au début elle pensait qu’on l’aiderait. Maintenant elle sait que non. Pas tout le temps. Des fois on l’aide, des fois on la gronde. Elle ne sait pas prévoir quand. Alors elle n’ose plus trop demander.

Elle a envie d’aller jouer dehors. Elle n’a pas le droit. Elle n’a pas fini ses devoirs. Maman rentre tard, ce soir. C’est rare. Elle voudrait lui faire la surprise des devoirs. Avoir tout fait bien toute seule.

Elle sait qu’elle n’y arrivera pas.

Elle pense au groupe théâtre. C’est super, le groupe théâtre. Mr Luchon est gentil. Et puis il est rigolo. Avec lui, rien n’est grave. Il n’y a pas de choses compliquées à comprendre. Et rien à calculer.  

Maman dit qu’elle n’est pas logique. Elle, elle croit surtout qu’elle est bête.


Bref.
Elle a besoin d’un orthophoniste.
 
 
Décret numéro 2002 721 du 2 mai 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'orthophoniste.
Art. 3. L'orthophoniste est habilité à accomplir les actes suivants: la rééducation des troubles du langage écrit (dyslexie, dysorthographie, dysgraphie) et des dyscalculies.